Article 19 AOÛT 2021

Le Passeport biologique de l’athlète : un outil important pour protéger le sport propre

Dans cette dernière édition de « Sous les projecteurs », qui fait le point sur les activités menées par l’équipe de l’Agence mondiale antidopage (AMA) et ses partenaires, nous nous penchons sur le Passeport biologique de l’athlète, un outil antidopage important qui permet le suivi au fil du temps de variables biologiques révélant les effets du dopage, par opposition à la détection directe de substances ou de méthodes interdites. Les précédents articles de « Sous les projecteurs » sont disponibles sur le site Web de l’AMA.

HISTORIQUE

Le terme « Passeport biologique de l’athlète » a été inventé au début des années 2000 par la communauté scientifique antidopage dans le cadre du suivi longitudinal de certaines variables hématologiques visant à détecter le dopage sanguin. En collaboration avec plusieurs partenaires et experts médicaux, l’AMA a joué un rôle de premier plan dans le développement, l’harmonisation et la validation de ce concept. Ce travail a donné naissance aux premières Lignes directrices opérationnelles pour le Passeport biologique de l’athlète destinées aux organisations antidopage, publiées par l’AMA en 2009, qui ont été conçues pour faciliter la mise en œuvre du module hématologique du Passeport biologique de l’athlète. En 2014, ce système initial a été complété par un module stéroïdien, lancé afin d’établir les profils longitudinaux des variables stéroïdiennes d’un sportif dans l’urine.

LE PROGRAMME DU PASSEPORT

Le programme du Passeport biologique de l’athlète repose sur une combinaison d’analyse statistique des résultats obtenus en laboratoire et d’évaluation des données du Passeport par des experts visant à identifier des sportifs ou des échantillons nécessitant une plus grande attention.

Ce programme comprend actuellement deux modules :

1. Le module hématologique, lancé en décembre 2009, qui vise à détecter les méthodes d’amélioration du transport de l’oxygène, y compris le recours aux agents stimulants de l’érythropoïèse et toutes les formes de transfusion ou de manipulation sanguine. Ce module évalue les variables liées à la manipulation sanguine par l’intermédiaire de l’analyse de l’échantillon de sang du sportif.

2. Le module stéroïdien, lancé en janvier 2014, qui vise à détecter le recours aux stéroïdes androgènes anabolisants quand ils ont été administrés de manière exogène (autrement dit, qui ne sont pas produits par le corps humain) et à d’autres agents anabolisants, dont les modulateurs sélectifs des récepteurs aux androgènes. Ce module évalue un ensemble d’indicateurs biologiques du dopage aux stéroïdes mesurés dans un échantillon d’urine du sportif.

« La gestion du Passeport exige une coordination et une collaboration entre les organisations antidopage et leur Unité de gestion du Passeport biologique de l’athlète, explique le Dr Norbert Baume, responsable du Passeport à l’AMA. Les Unités de gestion du Passeport ont une expertise spécifique en matière d’interprétation des données du Passeport et font partie des laboratoires accrédités par l’AMA situés dans diverses régions du monde. Elles examinent les Passeports sans connaître l’identité du sportif et peuvent transmettre les Passeports atypiques à des experts externes pour qu’ils les examinent et formulent des recommandations de mesures de suivi, y compris des contrôles ciblés, aux organisations antidopage. Le réseau des Unités de gestion du Passeport est essentiel pour assurer une gestion rapide, objective et de grande qualité des Passeports dans le monde. »

Pour assurer un examen équitable et cohérent des Passeports sur la base des connaissances scientifiques les plus récentes, le département Science et Médecine de l’AMA a lancé en 2021 un programme de formation sur le module hématologique du Passeport destiné aux experts chargés d’examiner les résultats de Passeports dans le Système d’administration et de gestion antidopage (ADAMS) pour le compte des organisations antidopage. Ce programme, qui comprend des documents de référence et une série de webinaires sur la plateforme d’éducation et d’apprentissage antidopage (ADEL) de l’AMA, est réservé à ces experts.

LE PASSEPORT EN PRATIQUE

Les avantages de l’intégration par une organisation antidopage du Passeport à son programme antidopage comprennent notamment :

1. L’identification et le ciblage de sportifs pour des contrôles spécifiques grâce à une interprétation intelligente et ponctuelle des données du Passeport. Ces contrôles de suivi comprennent, pour le module hématologique, l’analyse des érythropoïétines et des agents affectant l’érythropoïèse, et, pour le module stéroïdien, l’analyse de spectrométrie de masse à rapport isotopique pour détecter des stéroïdes endogènes naturels d’origine exogène.

2. La poursuite de possibles violations des règles antidopage conformément à l’article 2.2 (Usage ou tentative d’usage d’une substance interdite ou d’une méthode interdite) du Code mondial antidopage (le Code).

Le Passeport de l’athlète peut donc contribuer à sanctionner directement des sportifs, mais aussi entraîner d’autres décisions telles que le recueil d’échantillons supplémentaires d’un sportif, la réalisation d’analyses supplémentaires d’échantillons existants par d’autres méthodes d’analyse, le lancement d’enquêtes sur des sportifs ou des groupes de sportifs, ou la conservation d’échantillons à long terme pour réanalyse.

Le Programme du Passeport biologique de l’athlète a permis de déceler directement plus de 180 violations des règles antidopage à ce jour. Il continue également de se révéler efficace pour engendrer et soutenir des enquêtes. Le programme du Passeport a notamment permis de découvrir plusieurs cas de substitution d’échantillons d’urine qui ont donné lieu à des enquêtes du département Renseignement et enquêtes de l’AMA, telles que l’opération « Arrow » lancée en 2017 dans le sport de l’haltérophilie.

« Le Passeport est au fond un outil permettant de traduire des données biologiques d’un individu dans des actions concrètes en matière de lutte contre le dopage, explique le Dr Reid Aikin, directeur associé responsable du programme du Passeport à l’AMA. Il peut fournir des preuves solides pour sanctionner directement des sportifs et il permet en coulisses de guider de nombreuses autres activités antidopage telles que la planification de la répartition des contrôles et les enquêtes. »

 

Le nombre d’organisations antidopage se dotant d’un programme de Passeport de l’athlète continue d’augmenter. Aujourd’hui, plus de 190 organisations nationales antidopage, fédérations internationales et autres organisations antidopage l’utilisent stratégiquement dans le cadre de leurs programmes antidopage.

L’AVENIR DU PROGRAMME DU PASSEPORT

En ligne avec les priorités « Mener » et « Accroître l’impact » du Plan stratégique 2020-2024 de l’AMA, l’Agence continue de mener le développement du programme du Passeport, en collaboration avec divers partenaires dans le monde, notamment en perfectionnant les modules hématologique et stéroïdien, tout en poursuivant le développement et la mise en œuvre de nouveaux modules. L’AMA étudie également des moyens d’accroître l’impact du programme en continuant les avancées scientifiques et l’extension de son utilisation dans le monde.

L’AMA est en particulier en train de développer un module endocrinien pour mieux détecter les abus d’hormones, à commencer par l’hormone de croissance. En 2020, l’AMA a formé un Groupe de travail sur l’analyse endocrinienne chargé de formuler des recommandations à l’Agence concernant les exigences propres à ce module en matière d’analyse et de contrôle de la qualité externe.

En 2020, suite à une décision de 2019 du Tribunal arbitral du sport concernant deux cas présentés par l’Unité d’intégrité de l’athlétisme validant l’utilisation de marqueurs stéroïdiens dans le sang, l’AMA a créé un Groupe de travail sur les stéroïdes dans le sang pour formaliser les exigences pré-analytiques et analytiques pour la quantification de stéroïdes endogènes aux fins de suivi longitudinal dans le cadre du programme du Passeport.

L’AMA continue par ailleurs de mener d’autres projets de recherche ciblée pour le développement du Passeport, notamment la validation continue de marqueurs de volume plasmatique, l’utilisation d’outils de classification des tendances pour mieux repérer le dopage à l’EPO, l’application de méthodes d’intelligence artificielle pour la détection de substitution d’urine, et la poursuite de la standardisation de la numération des réticulocytes pour le Passeport.

« En ligne avec le Plan stratégique 2020-2024 de l’AMA, le département Science et médecine de l’Agence travaille activement avec des chercheurs, des experts et des partenaires du monde entier pour développer le Passeport et en accroître encore l’utilisation, indique le Dr Olivier Rabin, directeur principal, Science et médecine de l’AMA. L’objectif à long terme du développement du Passeport est la découverte, la validation et la mise en œuvre continues de nouveaux biomarqueurs de dopage dans les modules existants et de nouveaux modules, pour augmenter le nombre de substances interdites pouvant être détectées au moyen du Passeport et améliorer continuellement notre capacité de les détecter. »

« Le Passeport de l’athlète continue d’être un outil essentiel qui présente un potentiel de développement important pour la protection du sport propre. C’est également une priorité stratégique pour l’AMA en matière de recherche et développement. »

Pour plus d’informations, visitez la section « Passeport biologique de l’athlète » du site Web de l’AMA.